La Cour de cassation abandonne la survie des confiscations après l'extinction de l'action publique par le décès

Les ayants droit d'un prévenu décédé peuvent désormais demander la restitution des biens placés sous main de justice sans que le juge ne puisse imputer l'infraction ou prononcer une confiscation.

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 07/05/2024, 22-81.344

Dans un important arrêt du 7 mai 2024, la Cour de cassation est revenue sur sa jurisprudence relative aux effets du décès d'un prévenu sur les confiscations prononcées. Elle opère un revirement en abandonnant la possibilité pour le juge de statuer sur une peine de confiscation après l'extinction de l'action publique par le décès.

En l'espèce, M. [S] avait formé un pourvoi contre un arrêt de la cour d'appel de Paris qui l'avait condamné à une peine de confiscation pour blanchiment. Décédé après la formulation de son pourvoi, ses héritiers ont sollicité de la Cour de cassation de pouvoir reprendre la procédure.

La haute juridiction rappelle d'abord que le décès du prévenu entraîne l'extinction de l'action publique, qui s'étend à la peine de confiscation. Le pourvoi est donc devenu sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.

Rompant avec sa jurisprudence antérieure, elle juge que la cour d'appel ne peut plus se prononcer sur la peine de confiscation après l'extinction de l'action publique par le décès. Une telle confiscation constitue en effet une peine qui ne peut être prononcée que si le prévenu est déclaré coupable, ce qui est interdit par son décès.

Cependant, la Cour de cassation admet que les ayants droit du défunt peuvent demander à la cour d'appel la restitution des biens placés sous main de justice, sur le fondement des articles 479 et suivants du code de procédure pénale.

Dans ce cadre, la cour d'appel pourra se prononcer sur la caractérisation objective de l'infraction, mais sans pouvoir l'imputer au défunt ni se prononcer sur sa culpabilité. Les ayants droit seront par ailleurs recevables à contester l'infraction et le fait que les biens dont ils demandent la restitution en sont l'instrument ou le produit.

Cet arrêt réalise un juste équilibre entre l'exigence de ne pas condamner un défunt et la nécessité de préserver l'efficacité de la confiscation des avoirs illicites. Il consacre un changement de philosophie majeur en permettant aux ayants droit de discuter devant le juge de la caractérisation de l'infraction sans être exposés au prononcé d'une confiscation pénale.