Clarification sur l'exonération d'ISF pour les parts de société holding animatrice

La Cour de cassation précise les conditions d'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les parts de sociétés holding animatrices, mettant fin à une incertitude concernant la prise en compte des actifs des filiales dans l'appréciation du caractère professionnel.

Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 mai 2024, 22-18.812

Dans un arrêt rendu le 10 mai 2024, la Cour de cassation a apporté des précisions importantes quant à l'exonération d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les parts de sociétés holding animatrices. Cette décision met fin à une incertitude juridique concernant la prise en compte des actifs des filiales dans l'appréciation du caractère professionnel des parts détenues par le contribuable.

L'affaire portait sur le cas de M. [E], propriétaire de parts de la société Capimmo, une société holding détenant des participations dans des sociétés civiles immobilières. L'administration fiscale avait remis en cause l'exonération d'ISF dont bénéficiaient ces parts au motif que Capimmo ne pouvait être qualifiée de société holding animatrice, ses filiales n'exerçant pas d'activité commerciale ou industrielle.

Après le rejet de sa réclamation, M. [E] avait saisi la justice pour contester cette position. La cour d'appel de Lyon avait donné raison à l'administration fiscale, jugeant que les parts de Capimmo ne pouvaient être considérées comme des biens professionnels exonérés d'ISF.

M. [E] s'est alors pourvu en cassation, invoquant notamment une violation des articles 885 O ter et 885 O quater du code général des impôts, qui définissent les conditions d'exonération d'ISF pour les biens professionnels.

Dans son arrêt, la Cour de cassation a rappelé les principes applicables. Selon l'article 885 O ter, seule la fraction de la valeur des parts ou actions correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel. L'article 885 O quater précise que ne sont pas considérées comme des biens professionnels les parts ou actions de sociétés ayant pour activité principale la gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier.

La Haute juridiction en a déduit que les parts ou actions de sociétés exerçant à la fois une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et une activité civile de gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier peuvent bénéficier du régime des biens professionnels exonérés d'ISF uniquement si cette dernière activité n'est pas exercée à titre principal et seulement pour la fraction de la valeur de ces parts ou actions nécessaires à l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

Cependant, la Cour a estimé que la cour d'appel de Lyon n'avait pas correctement appliqué ces principes. En effet, après avoir relevé que la société Capimmo exerçait à titre principal une activité commerciale, la cour aurait dû rechercher la fraction de la valeur des parts de cette société correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à cette activité commerciale, au lieu d'exclure purement et simplement les parts du régime des biens professionnels.

Par cet arrêt, la Cour de cassation clarifie donc les règles applicables en matière d'exonération d'ISF pour les parts de sociétés holding animatrices. Elle réaffirme que l'exonération ne peut être totalement écartée du seul fait que la holding détient des participations dans des sociétés civiles immobilières. L'administration fiscale devra examiner la fraction de la valeur des parts correspondant aux éléments nécessaires à l'activité commerciale ou industrielle exercée par la holding, et non se fonder sur les actifs détenus par les filiales.

Cette décision est saluée par de nombreux fiscalistes comme un rappel bienvenu des principes régissant le régime des biens professionnels en matière d'ISF. Elle devrait permettre de sécuriser la situation des contribuables détenteurs de parts de sociétés holding animatrices, en écartant l'argument selon lequel la nature des actifs détenus par les filiales pourrait remettre en cause l'exonération.

Cependant, l'appréciation de la fraction de la valeur des parts correspondant aux éléments nécessaires à l'activité commerciale ou industrielle de la holding reste une question de fait, qui pourra donner lieu à des débats au cas par cas. Il appartiendra aux contribuables de bien justifier des éléments de leur dossier pour bénéficier de l'exonération d'ISF sur leurs parts de société holding animatrice.