Acquisition de la nationalité française : fin d'une discrimination entre les pères et les mères

Dans une décision très attendue, le Conseil constitutionnel a censuré la disposition du Code de la nationalité française qui subordonnait l'effet collectif de l'acquisition de la nationalité par la mère au fait qu'elle soit veuve.

Acquisition de la nationalité française : fin d'une discrimination entre les pères et les mères

Conseil constitutionnel, 25/04/2024, 2024-1086 QPC

Par sa décision n° 2024-1086 QPC du 25 avril 2024, la haute juridiction a déclaré contraires à la Constitution les mots "si elle est veuve" figurant à l'article 84 de l'ordonnance du 19 octobre 1945 portant code de la nationalité française. Cet article prévoyait que l'enfant légitime ou légitimé devenait français de plein droit si son père acquérait la nationalité, mais seulement si sa mère était veuve dans le cas contraire.

Le Conseil a estimé que cette différence de traitement entre le père et la mère "n'est justifiée par aucune différence de situation". Le motif de garantir l'unité de nationalité au sein de la famille ne saurait en effet légitimer une telle discrimination fondée sur le sexe.

La juridiction constitutionnelle a jugé ces dispositions contraires au principe d'égalité devant la loi et au principe d'égalité entre les hommes et les femmes, consacré par le Préambule de la Constitution de 1946.

Dans sa décision, le Conseil précise les effets à donner à cette censure. Elle ne pourra être invoquée que par les enfants légitimes ou légitimés dont la mère a acquis la nationalité française pendant leur minorité, ainsi que par leurs propres descendants si nécessaire. L'inconstitutionnalité est applicable aux instances non jugées définitivement.

Cette décision marque une nouvelle étape vers l'égalité des sexes en matière de droit de la nationalité. Elle met fin à un archaïsme juridique tenant la mère dans une situation d'infériorité par rapport au père pour la transmission de la nationalité à ses enfants légitimes.

De nombreuses voix s'étaient élevées pour dénoncer cette disposition discriminatoire, qui faisait régulièrement l'objet de Questions prioritaires de constitutionnalité. Le Conseil constitutionnel a finalement rejoint cette analyse dans un arrêt très attendu et salué par les défenseurs des droits des femmes.